« [...] nous avons été sidérés d’apprendre que l’Équipe de France a refusé de s’entrainer dimanche. Comme la plupart des amateurs de football, nous ne savions pas que l’Équipe de France s’entrainait tout court. [...] L’expérience de la France durant cette coupe du monde ressemble désormais à une excursion maternelle qui a mal tourné. [...] Y aura-t-il quiconque hors de France pour applaudir les Bleus mardi soir contre les accueillants Bafana Bafana ? »
Jason Gay, Now Appearing in South Africa: Les Misérables – The Wall Street Journal
Il y aurait beaucoup de choses à dire sur l’actuelle Équipe de France de football, et beaucoup de choses ont déjà été dites. Des joueurs aux politiques, du staff à la fédération, en passant par les amateurs, la presse et les experts du ballon rond, tous ont à un moment ou à un autre réagi à la piètre performance de l’équipe depuis quelques jours. Et si je ne suis pas un grand amateur de foot, difficile de ne pas être insensible à cette improbable trajectoire que prend l’Équipe de France. Trajectoire qui a l’allure d’une dernière vrille d’un avion en flammes.
On pensait sans doute qu’après le navrant épisode de 2002, jamais l’Équipe de France ne tomberait aussi bas. Sots que nous étions. Non content de ne pas parvenir à ouvrir le score, non content de ne pas réussir à faire peur aux autres équipes, voilà que l’équipage se saborde de lui-même. Inévitablement, le terrain est fertile pour voir percer les théories les plus improbables. Des clans se forment, des joueurs seraient ostracisés. L’Équipe de France révélateur d’un malaise dans notre société ?
Le climax de cette ambiance délétère s’est d’ailleurs déroulé ce week-end, suite à l’expulsion de Nicolas Anelka. L’attaquant de Chelsea se serait opposé violemment au diagnostic de Raymond Domenech, ce dernier lui reprochant de ne pas avoir respecté les consignes de jeu pour gagner contre le Mexique. Évidemment, cette affaire a fini par sortir de l’intimité des vestiaires, éclatant au grand jour dans la presse. Être la risée du monde ne va pas être facile.
Et le délire ne s’est pas arrêté en si bon chemin. Patrice Evra, le capitaine, a évoqué un « traitre » dans l’équipe ou dans le staff. À croire que le maccarthysme peut s’appliquer à n’importe quel domaine, même dans le sport de haut niveau. Depuis, les joueurs ont transmis une lettre ouverte à la presse, ont refusé de s’entrainer et, comble du délire, ont empêché leur propre entraineur de remonter dans le bus. On nage en plein délire, et nul doute que les Irlandais savourent leur « revanche ».
Difficile de démêler ce sac de nœuds, puisque le psychodrame va très certainement se poursuivre jusqu’à mardi soir, lorsque nos onze Bleus vont s’éteindre pathétiquement contre le dernier match de poule face à l’Afrique du Sud. À moins d’un sursaut et d’une chance inattendue, nous ne passerons certainement pas le premier tour. Mais à l’heure du crépuscule des Bleus, qui le souhaite ?
Photos : Les Misérables – CC BY-NC-SA zeitengewimmel // World Cup 2010 South Africa – CC BY-NC-SA Ralph Pina